La Compagnie des loupsRéalisateur : Neil Jordan
Avec : Sarah Patterson, Angela Lansbury, David Warner, Shane Johnstone
Pays : USA/G-B
Année : 1984
Critique :
Ce film est construit par un jeu d’emboîtements narratifs : une jeune fille s’est enfermée dans sa chambre, elle rêve. Ça c’est le niveau qui encadre l’histoire. Nous plongeons dans le monde de ses rêves, et c’est l’univers des contes d’antan qui s’anime devant nos yeux éblouis. Dans ce second niveau, certains personnages racontent des histoires, qui sont mises en images.
Pour donner une idée de la trame principale, du fil rouge, je dirais que c’est une exploration de l’univers du Petit chaperon rouge, de manière beaucoup plus étoffée que le conte que nous connaissons tous. La Compagnie des loups développe les thèmes qui sont explicites, aussi bien que ceux qui sont latents dans le conte. Avec un regard d’auteure moderne sur l’histoire traditionnelle (le film est réalisé par Neil Jordan, futur réalisateur de Entretient avec un vampire, d’après une histoire d’Angela Carter) : si la morale traditionnelle est constamment rappelée (notamment avec le personnage de la grand-mère), le film évoque en fait l’éveil d’une jeune fille à la sensualité, et prend le contre-pied du discours moralisateur mettant en garde les filles contre les vils séducteurs … Il y a aussi des éléments extérieurs à l’histoire du Petit chaperon rouge, et notamment des clins d’œil à d’autres contes. De nombreux symboles peuvent être décelés.
La photographie est ultra soignée. Les éclairages sont superbes. Ce film est une merveille visuelle ; à chaque plan, nos yeux se régalent. Il a été tourné presque entièrement en studio ; toute la forêt et le village ont été créés pour les besoins du film. Ce choix de ne pas tourner en décors naturels se révèle pertinent : l’atmosphère obtenue colle parfaitement à l’univers des contes (des décors naturels auraient eu un cachet trop réaliste pour cette histoire).
Il y a de ces scènes qu’on aimerait avoir filmées soi-même, tant elles sont extraordinaires ; ainsi, celle où un loup saute à travers un tableau : j’ai adoré !
Onirique, merveilleux, beau, terrifiant, envoûtant, La Compagnie des loups recèle aussi des éléments grotesques – et en cela aussi il est fidèle aux rêves (Qui n’a jamais fait de rêves grotesques ?) – comme par exemple les loups au mariage, revêtus d’habits distingués du 18ème siècle, ou bien, à un moment, une langue démesurée et obscène.
Le seul point négatif se situe au niveau des effets spéciaux : les transformations sont variées et originales, mais malheureusement, on voit beaucoup trop que c’est du toc. Malgré cela, La Compagnie des loups demeure un vrai joyau filmique.
Une fois le film terminé, je n’avais qu’une envie : me replonger dedans. Signe qui ne trompe pas !